La meilleure version de moi-meme : critique gui?re toute Blanche via Canal+

Et si l’auto-derision et l’humour depreciatif avaient une influence sur la sante (et le transit intestinal) des humoristes ? C’est le propos de depart de votre faux documentaire de l’actrice Blanche Gardin, qui retrace ses adieux au stand-up et son envie de prendre un brin plus lait d’elle. Au programme : Instalives, groupe de parole feministe, chamanisme et medecines new age. Avec Notre meilleure version de moi-meme, la comedienne realise une mini-serie Canal+ hilarante (quoiqu’un minimum longuette) sur l’absurdite et le narcissisme de l’heure actuelle.

PETE UN COUP, T’ES TOUTE PALE

Nul fan de Blanche Gardin ne est etonne : la collection commence avec une serie de blagues scatophiles. Chaque fois qu’elle sort de scene (on reconnaitra l’etrange robe bleue de le spectacle Bonne nuit Blanche, disponible sur Netflix), l’actrice est prise de constipation et de coliques intenses. Les recommandations avises des medecins (qui deplorent un stress chronique) ne lui suffisent plus. Elle va voir un naturopathe et le diagnostic reste pertinent : a force de se deprecier elle-meme via scene, la comedienne s’accable quantite de maux et ne parvient plus a suivre. Vous devez que les choses changent. et elles vont changer de maniere radicale.

L’actrice decide de rompre completement avec la comedie, de demagnetiser son eau, de changer de cure alimentaire (plusieurs fois) ainsi que faire la paix avec ses anciens detracteurs. essentiellement nos jeunes feministes qu’elle offusque avec chacune de ses saillies. Tout cela, naturellement, reste documente a la fois avec la camera-epaule d’un mysterieux Boris, qui filme Blanche dans chacune de l’ensemble de ses experiences, ainsi, bien sur, par une serie de live Instagram En plus en plus ridicule.

Une seance de chirurgie spirituelle (de charlatanisme)

Pour bien comprendre la collection, on doit probablement avoir en tronche nos discours de Blanche Gardin aux Cesars de 2017, puis lors des ceremonies des Molieres en 2017, 2018 et 2019. En 2018, elle a d’ailleurs recu le precieux Moliere de l’humour (concernant la premiere fois), un Moliere qu’elle s’etait decerne a elle-meme en raillant un effort de “discrimination positive” apres le vague #MeToo. Notre meilleure version de moi-meme s’inscrit dans la lignee directe de votre discours : Blanche Gardin veut tourner la page de l’humour noir, qui possi?de fera le succes autrefois – et comme toujours, c’est bougrement drole. Sa volte-face atteint Du Reste son paroxysme quand elle balance ses deux trophees dans un feu de joie, enieme doigt d’honneur a la bienseance.

La totalite des themes ayant fait son succes paraissent presents : l’humour noir et depreciatif, l’absence de filtre quand elle cause des fluides corporels et evidemment, la critique aceree de la agence qui possi?de parfois mode a marcher dans la tronche. Entre deux blagues de constipation, elle sabre les complotistes, nos feministes qui descendent nos autres jeunes femmes, la victimisation de tous omnipresente et J’ai tentation en censure.

Blanche est une femme deconstruite

“L’HUMOUR, C’EST LA SEULE CHOSE que TU SAIS FAIRE !”

Et tac ! Au moment oi? Blanche annonce le retrait de la scene comique a une famille, sa mere l’envoie en fleurs illico-presto. Peut-etre bien que Realiser rire, c’est votre seule chose que Blanche Gardin sache faire et c’est tant mieux. Chacune des apparitions comiques reste brillante (on rappellera l’excellent Effacer l’historique) et votre collection ne fera nullement exception. A l’ecriture, elle retrouve le compere Noe Debre (Parlement, Problemos) et leur cooperation est evidente. La serie reste vraiment beaucoup ecrite, avec juste la belle dose de crasse ainsi que sous-texte politique. Digne du meilleur stand-up.

Miroir, mon beau miroir

On sait que la comedienne n’a moyennement les faveurs des feministes. Apres avoir lance un delicieux gros tacle a Roman Polanski au cours de sa premiere intervention a toutes les Cesar, cette dernii?re a nombre tourne en derision le mouvement #MeToo et ses derives. En faisant mine d’effectuer amende honorable, elle s’enfonce De surcroit et puis au politiquement incorrect et souligne l’absurdite ambiante (si on defend la liberation de la femme, faut-il virer sa femme de menage pour “la liberer” ?).

A mesure que la saison progresse, l’actrice devient completement taree et souscrit aux theses de l’ensemble des charlatans a la mode. Le propos prend une autre dimension : il ne s’agit jamais simplement de regler ses comptes, l’actrice part en croisade contre le nombrilisme et J’ai betise.

“Vive les fetes de famille !”

Blanche Gardin est la seule star a bord. Nos fans hardcore seront ravis de decouvrir le visage de Maia Sandoz (sa metteuse en scene, qu’elle cite regulierement), mais tous les autres protagonistes entrent, servent un blague et ressortent. L’ensemble de sauf 1. Un seul personnage secondaire reste legerement etoffe (beaucoup qu’il n’apparaisse limite que derriere un ecran d’ordinateur) : il s’agit du comedien americain Louis C.K., legende du stand-up (tout i  l’heure en disgrace apres une affaire d’exhibition sexuelle).

Dans notre adam4adam reddit vie reelle, les 2 humoristes paraissent aussi en couple ; ils se sont rencontres apres que Blanche l’a remerciee pour la matii?re au cours de le discours aux Moliere. Dans la collection, il interprete votre amant longue distance, coince a New York, qui voit sa compagne devenir completement marteau et encaisse chacun de ses caprices. Blanche Gardin reste assez discrete dans sa relation avec le modele et votre serie satisfera a coup sur nos vrais nerds du stand-up.

On soulignera aussi l’intelligence du dispositif : Boris et sa camera qui tremblote, les jeux constants avec le quatrieme mur, des references constantes au narcissisme de Blanche. Le faux documentaire est un genre impeccablement adequat a son look d’humour.

Louis et Blanche, rois de l’incorrect

FAUT-IL CULTIVER NOTRE GARDIN ?

Reste que la serie est si»rement bon nombre trop longue pour son propre bien. Au bout de six episodes, la collection commence legerement a trainer et la caricature qui faisait le genie des premiers episodes s’essouffle. On pense surtout aux deux episodes sur les groupes de parole feministes, toujours tres droles, mais qui empilent une plethore de cliches faciles. Blanche Gardin y retrouve un role de sorciere new age moralisatrice, votre role qui rappelle celui qu’elle s’etait ecrit dans Problemos d’Eric Judor. Bis repetita.

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