Lundi 25 mai, George Floyd, un homme noir de Minneapolis, est mort assassine par un policier blanc.
Le 23 fevrier, Ahmaud Arbery, un homme noir de Brunswick, a ete assassine par trois hommes blancs, dont un ancien policier, alors qu’il faisait son jogging. Le 13 mars, Breonna Taylor, une femme noire de Louisville, a ete assassinee chez elle par des policiers blancs qui pensaient faire une descente chez un couple suspecte de trafic de drogue.
Ces derniers meurtres viennent s’ajouter a une longue liste de personnes noires tuees dans les rues americaines, avec pour seul motif : leur couleur de peau. Ils viennent prouver, une fois de plus, que le racisme y est systemique, institutionnel, enracine. Et la rage des manifestant·e·s, qui protestent dans les rues de Minneapolis, Los Angeles ou encore New York, n’en est que plus legitime.
Et en France ?
En France, le 23 mai, Camelia Jordana denoncait sur le plateau d’On n’est pas couche les violences policieres qui sevissent dans l’Hexagone. Elle y exprimait sa peur devant la police. “Il y a des milliers de personnes qui ne se sentent pas en securite face a un flic et j’en fais partie”, confie-t-elle. “Les hommes et les femmes qui vont travailler tous les matins en banlieue se font massacrer pour nulle autre raison que leur couleur de peau”.
La jeune femme relate des faits, un vecu, qui ne date pas d’hier, pour alerter l’opinion public. En face, Philippe Besson, ecrivain et scenariste blanc, s’entete a lui repondre que “Eux aussi (sous-entendu les policiers, ndlr) sont parfois attaques” et que “95 % des flics font bien leur travail”, invisibilisant au passage la realite de ce qu’elle avance.
Ses propos soutenus par Assa Traore, dont le frere, Adama Traore, jeune homme noir de 24 ans, est mort en garde a vue (la famille conteste d’ailleurs les dernieres conclusions medicales qui exonerent les gendarmes), relancent un mouvement de colere. De son cote, le ministre de l’Interieur, Christophe Castaner, les jugera “mensongers et honteux”, et restera muet face aux sollicitations de debat de l’artiste.
Alors que nos yeux sont rives vers les Etats-Unis, il est essentiel de rappeler que ce meme racisme systemique, institutionnel enracine perdure de ce cote de l’Atlantique, dans chaque strate de la societe. Et par “nos yeux”, comprendre ceux des Blanc·he·s. Celles et ceux qui, comme nous, jouissent de privileges relatifs a leur couleur de peau. De nombreux·ses activistes noir·e·s l’ont scande sur les reseaux sociaux : le racisme est notre probleme, pas celui des personnes racisees.
C’est a nous, Blanc·he·s, de le combattre. Au sein de notre famille, de nos relations amicales et professionnelles, de notre propre comportement. A nous de deconstruire un mode de pensee discriminant, base sur des stereotypes coloniaux perseverants. A nous d’agir, de se revolter https://datingmentor.org/fr/gleeden-review/ concretement, de sortir d’un silence qui n’a rien de neutre, sans voler la parole ni endosser un role de “sauveur blanc” problematique.
Etre en colere ne suffit plus. Etre en colere n’a jamais suffi. Pour faire mieux, pour devenir un·e allie·e digne du nom et de ceux et celles aupres desquels on souhaite se tenir, voici une liste non-exhaustive de reflexes a adopter urgemment, enrichie par les voix des concerne·e·s.
1- Admettre l’existence de ses privileges et ce qu’ils impliquent
“Tous les Blancs ont le privilege d’etre blancs”, assure Dr Shola Mos-Shogbamimu, avocate, defenseuse des droits des femmes et fondatrice de Women In Leadership Publication, a Stylist. “Cela ne veut pas dire que vous etes raciste. Cela signifie simplement que vous etes avantage par rapport a une personne de couleur, independamment de votre situation socio-economique, uniquement en raison de la couleur de votre peau”.
Dans une publication realisee par Courtney Ahn, graphiste coreenne-americaine, qui a largement circule sur Instagram ces derniers jours, l’artiste enonce a son tour : “Le privilege blanc ne veut pas dire que votre vie n’a pas ete dure, cela signifie simplement que votre couleur de peau ne l’a pas rendue plus dure !” Elle developpe : “Le privilege blanc est le resultat d’un racisme historique et durable, de prejuges et de pratiques visant a opprimer les personnes de couleur”.
Lorsque l’on beneficie de ce privilege, on profite “activement de l’oppression de personnes de couleur.” Nous sommes ainsi la representation dominante dans les medias, notre citoyennete n’est pas remise en question, les produits commerciaux sont crees pour nous en premier, nos collegues nous ressemblent, nous ne sommes pas harcele·e·s dans les lieux publics pour le simple fait d’exister. En prendre conscience, c’est reconnaitre l’injustice que cela provoque.
2- Ne pas se dire “choque·e” de la situation
Comme le souligne l’autrice et militante Rachel Elizabeth Cargle, “l’empathie passive” ne suffit pas. Dans un message qu’elle a adresse aux Blancs du monde entier, elle ecrit son ras-le-bol d’entendre dire “Je suis choquee”, “Je ne peux pas croire ca”, “Je n’en avais aucune idee” ou “Cela ne peut pas etre reel”.
“[Il est] sauvagement choquant que notre douleur soit si loin de votre radar qu’elle vous choque”, publie-t-elle. “C’est en fait blessant de savoir que les infos qui m’empechent de dormir la nuit n’ont meme pas ete un sujet de conversation dans votre monde.”
A la place, elle suggere fortement de remplacer ces mots par des actions. Et de repondre verbalement a ces crimes racistes par ces phrases : “J’ai trouve une organisation qui aide dans ce genre de cas et j’ai donne de l’argent” ; “J’ai aborde ce sujet avec mes collegues et ma famille pour que nous puissions parler de ce qui s’est passe” ; “J’ai fait plus de recherches sur ce sujet et j’ai appris plus sur l’histoire de cette question raciale particuliere”.
3- Ne pas participer a diffuser les images de l’assassinat de George Floyd
“Pendant des siecles, la mise en spectacle des corps noirs mourants a ete un moyen de terroriser les Noirs”, ecrit la journaliste Rokhaya Diallo sur Twitter, mercredi 27 mai. “La circulation des images insoutenables de l’atroce agonie de George Floyd contribue a la perpetuation de ce recit. Cet homme merite d’etre commemore tel qu’il a vecu.”
Notre journaliste poursuit : “Qui a encore besoin d’assister a l’incessante souffrance des corps noirs Afin de croire que le racisme les brise et les tue ? Nous SAVONS TOU·TE·S ce qui se passe depuis des siecles, reclamer des preuves pour agir ou prendre conscience de la situation est indecent. Et on ne mesure pas les dommages psychologiques que le fait de voir des Noirs assassines produit sur les personnes noires, notamment les plus jeunes. Comme les images de famines ou de guerre relayees avec complaisance cela contribue a la deshumanisation des corps noirs.”
Commemorer, partager, alerter, oui, mais sans transformer son soutien en une exhibition malsaine. Utiliser plutot les mots, et les visages d’hommes et de femmes lorsqu’ils etaient vivant·e·s, pour denoncer les crimes racistes dont ils ont ete victimes.